Suite à la parution d’un article incomplet me concernant sur le site du Parisien le 16 février 2016 permettez moi de vous proposer une version modifiée ci-dessous (rajouts en bleu) :
Il aura tenu la même posture jusqu’au bout, droit dans ses Caterpillar et se basant uniquement sur les faits avérés « Je vous remercie de m’avoir écouté », lâche calmement François Pelletant, le maire (UDI) de Linas, ce lundi soir, aux juges de la 9e chambre correctionnelle de Créteil (Val-de-Marne).
Il est plus de 22 heures. Quelques minutes plus tôt, le ministère public a requis à son encontre trois ans de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité ainsi que 20 000 € d’amende en se basant uniquement sur le dossier d’accusation puisque la Procureur de Créteil a refusé de prendre en compte les pièces présentées en défense par l’avocat de M. Pelletant, produites trop tardivement.
Maire de Linas (6 500 habitants) depuis 1995, l’ancien conseiller général de l’Essonne est notamment accusé d’avoir détourné des fonds publics en employant une dizaine de jeunes en contrats d’avenir dans deux de ses associations (lire ci-dessous) entre 2013 et 2015 – alors que les services de l’Etat, la Région et l’ Agence de Paiement les avaient pourtant validés, mais aussi de ne pas avoir payé des heures supplémentaires à plusieurs de ses salariés alors que ces heures ont été récupérées en compensation de repos, et d’avoir fait transporter avec un camion de sa mairie du bois de sa commune vers le bar associatif dont il était responsable à Villejuif (Val-de-Marne), alors que le bar n’existait pas au moment de la soi-disant livraison ; ces derniers faits ayant déjà été examinés par la justice en Essonne sans suite.
Onze chefs d’accusation du jamais vu qui parle de lui-même
A chacun des onze chefs d’accusation, François Pelletant, déjà condamné en 2006 pour favoritisme, jugement cassé et requalifié en faute des services de la maire, a justifié ses actes et apporté au tribunal de nombreuses preuves et justificatifs. Avec volubilité et sang-froid, sans jamais élever la voix car quand les faits vous donnent raison il n’y a aucune raison de jouer les divas du barreau.
« L’inspection du travail a constaté en 2013 que le bar associatif XO fonctionnait avec essentiellement des contrats d’avenir dans son personnel. Sur la carte du bar, on retrouve du vin rouge, de la bière, des spiritueux, de la vodka, de la Suze, des cocktails… Qu’est-ce qui différencie cette carte d’un autre bar au registre des sociétés ? En quoi votre établissement répondait à un besoin collectif non satisfait dans ce secteur géographique (c’est l’un des critères pour pouvoir obtenir des contrats aidés mis en place par l’Etat, ici via la région Ile-de-France) », l’interroge le président du tribunal.
« Ce bar ne faisait pas que ça. Il menait des activités culturelles 25 concerts, conférences, expositions artistiques, il utilisait des produits issus du commerce équitable, il proposait des plats de producteurs alternatifs, toutes les semaines un plat à 3 euros pour les plus démunis (action relayée dans Le Parisien du 28 janvier 2015) et surtout le bar à embauché 13 jeunes chômeurs dont 8 sans aucune qualification. Depuis la fermeture de l’établissement (à l’été 2015), il n’y a plus rien du genre au-delà du périphérique », ose François Pelletant et les jeunes qui travaillaient à l’XO Bar sont maintenant sans emploi.
« Rien n’indiquait pourtant dans le bar que c’était une association », rétorque le président du tribunal. « Tout était fait pour attirer la clientèle. Le côté marchand n’était pas un caractère accessoire. C’était le but », ajoute l’inspecteur du travail à l’origine de l’ouverture du dossier car on pense dans ces administrations que les associations vivent d’amour et d’eau fraîche et qu’elles doivent subsister sans argent. La région, elle, s’est portée partie civile, estimant son préjudice total à 24 000 € occultant qu’elle était en quelque sorte complice pour avoir vérifié et validé la bonne régularité les dossier de subventions qu’elle avait versées.
« A la tête d’une vingtaine d’appartements qu’il loue à des conditions sociales »
Sur le non-versement des heures supplémentaires aux jeunes employés, l’accusé brandit la carte de « l’annualisation du temps de travail » dans le cadre des 35 heures argument imparable car en effet il ressort de tous les contrats de travail et de toutes les conventions de subventions que les employés n’avaient pas un horaire fixe mais avaient des périodes de travail intenses suivies de repos.
Et sur les huit chèques d’une valeur totale de 22 590 € versés directement sur son compte personnel ? « J’achetais moi-même du matériel pour AHB (Amélioration Habitat Bâtiment). L’association n’avait pas forcément la trésorerie nécessaire. J’avançais l’argent, avec en plus des réductions grâce à ma carte nominative à Castorama », explique François Pelletant en apportant sur le bureau du tribunal l’ensemble des doubles des factures et justificatifs rassemblés en dépit de la perte des originaux dans les services enquêteurs. La somme exacte de 22 951.35 € est ainsi incontestablement
Avec une assurance qui peut agacer ses détracteurs, stupéfiés de voir ainsi fondre une à une les accusations portées, l’élu a rappelé que ces remboursements étaient aussi vérifiés par un expert comptable et une fonctionnaire de la mairie de Linas , missionnée pour cela suite aux accusations infondées de l’opposition.
« Il a réponse à tout. Quand on l’écoute, on a presque envie de lui donner la médaille du travail, souligne Me Rémi Pierre Drai, défendant les intérêts de l’opposant municipal de Linas, Christian Lardière, qui avait trouvé là une tribune politique inespérée. L’avocat qui a déjà perdu deux procès en décembre et janvier derniers contre Francois Pelletant continuait de plus belle : “En réalité, c’est un enfumeur dans la mesure où il essaie d’endormir tout le monde pour se servir. Aujourd’hui, Monsieur Pelletant est à la tête d’une vingtaine d’appartements à Corbeil, Epinay-sous-Sénart, Villejuif. Comment un élu arrive à se constituer un tel patrimoine ? » jetant le doute sur la probité de l’élu et sur le travail de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique qui contrôle les déclarations de patrimoine des élus.
Une question provocatrice qui n’a pas eu le moindre effet sur François Pelletant, qui lorsqu’il avait la parole a rappelé qu’un quart de ses logements était conventionné en Très-Social (ex : un studio 228 €/ mois attribué en 2015 par la préfecture de l’Essonne), et que les trois autres quarts sont attribués sans exigence de taux d’effort, de garant ou de CDI (44% de ses bénéficiaire de logements sont au RSA ou sans activité). Son avocat a rappelé le droit qui s’impose au tribunal en dépit de considérations politiques que Maître Drai, avocat du chef de l’opposition de Linas mais aussi du promoteur ABCD, en indélicatesse avec François Pelletant sur une autre affaire, a tenté d’imposer dans ce procès.
Le jugement a été mis en délibéré au 14 mars prochain.
Le « système Pelletant » modèle a suivre
Les deux associations de François Pelletant — Aceda (Association pour la création et expérimentation d’activités, qui gérait le bar XO à Villejuif) et AHB (Amélioration Habitat Bâtiment) — sont des micro associations car elles sont constituées de très peu de membres. Elles respectent la règle du premier article de la loi de 1901 qui dit : “L’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices.”
On peut estimer à la moitié le nombre d’associations fonctionnant avec moins de 5 personnes en France. Cette réalité du monde du bénévolat, qui semble échapper à ceux qui n’en ont jamais fait partie , n’est certes pas l’image que l’on peut avoir des associations dans le grand public où on connait plutôt les club de sport, ou les grandes fondations (ARC, Emmaüs, …).
L’ancien informaticien de formation est devenu un spécialiste des micro-associations. Outre Aceda et AHB, l’élu de 50 ans est également président d’une association, SD Asso, qui milite en Essonne – notamment là où c’est le plus nécessaire: à Corbeil-Essonnes -contre les inepties urbanistiques et la défense de l’environnement. Le premier magistrat de Linas est aussi à la tête de l’association des Maires Franciliens, dont toutes les communes de l’Ile-de-France sont membres de droit et à laquelle cotisent 500 communes tous les ans. Cette association est dirigé par un bureau de 5 personnes élus par les membres en 2015. L’an passé, le vice-président de la communauté Paris-Saclay dirigeait encore l’association Carrefour des Communes fonctions qu’il a arrêté pour se consacrer au déploiement de la fibre optique dans cette intercommunalité.
« Je suis dans le milieu associatif depuis tout jeune, se justifie l’élu de 50 ans, passionné de jazz, de moto et de bricolage. Aujourd’hui les gens qui entreprennent des choses le font toujours avec le but de s’enrichir, ils créent des sociétés pour cela, mais il y a aussi des citoyens qui veulent agir sans recherche de profit, uniquement pour s’épanouir, et ceux là font comme moi, ils créent et développent des associations».
La multiplication des associations de François Pelletant a pourtant été pointée du doigt à l’audience, illustrant combien le volontariat semble quelque chose d’inconcevable par ceux qui pensent que toute action humaine ne peut pas être désintéressée.
En plus du temps et de l’argent qu’il a donné à ses associations, comme d’autres s’achètent à 40 ans une Rolex , ou une voiture sportive, François Pelletant a aussi fourni des chantiers pour les jeunes qui travaillaient en contrats d’avenir au sein de l’association AHB, bien sûr en payant au prix réel les prestations auprès de cette association. Il a été le seul, ces dernières années à le faire, d’autres clients potentiels ayant préféré avoir recours à des entreprises professionnelles plutôt qu’une association de jeunes sans expérience.
« AHB a entrepris des démarches pour trouver d’autres clients sur Internet. On a passé des annonces sans succès », s’est défendu François Pelletant.
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